AFTERNOON

Deux hommes sont assis sur des chaises sommaires dans le coin d’un immeuble en ruines. Par les cadres d’anciennes fenêtres, la jungle d’un vert presque surnaturel commence à envahir l’espace de béton nu. Filmés en légère plongée, ils occupent le tiers droit de l’image. Et tandis que la caméra les fixe, ils parlent. De tout. De leurs souvenirs respectifs ou partagés, de leurs vies, de leurs familles, de leurs désirs, de la fin qui fait peur. De création aussi et surtout. Car les deux hommes ne sont autres que Tsai Ming-Liang et son acteur fétiche Lee Kang-sheng, celui que le cinéaste taïwanais a fait tourner dès son premier long, Rebels of the Neon God en 1992 jusqu’à son plus récent Stray Dogs, dans absolument tous ses films. Décortiquant comme il a rarement été possible de le voir la relation intime pouvant exister entre un cinéaste et un acteur, Afternoon est un film dont la sincérité grimpe crescendo pour mieux toucher, l’air de rien, droit au cœur. Présenté aux derniers festivals de Venise et Toronto, il est aussi un film qui célèbre l’art de la conversation, entre essai, témoignage et document aussi rare que précieux. −Helen Faradji